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Photo du rédacteurJonathan Buisson (Cloud Pouarier)

L'autoroute Décarie et la coupure dans le village de Notre-Dame-de-Grâce

Dernière mise à jour : 15 août 2022

En 1912, on donne officiellement le nom de chemin Décarie à ce tronçon qui traverse presque toute l’île de Montréal dans l’axe nord-sud.


Le chemin est nommé en l’honneur de la famille Décarie, cette famille pionnière du quartier. Au cours de son passage à travers le temps, on y verra passer des chevaux, des tramways et maintenant des automobiles.

En fait, ces trois modes de transport se sont côtoyés à cette intersection pendant un certain temps.


Selon les époques, ce chemin a d’abord été un sentier, un rang et un chemin carrossable pour finir en tranchée autoroutière à grande vitesse.


Cette autoroute passe sur les terres ancestrales de la famille Décarie qui a joué un rôle important dans ce secteur de Montréal en devenant

producteur de melon, créateur du fameux melon de Montréal et en participant aussi activement à la vie politique de Montréal.

Pour que le tramway passe dans ce secteur en 1895, Zotique et Gervais Décarie cédèrent à la société de la Montréal Park and Island Railway une bande de terre de 35 pieds de largeur par un mille de longueur pour permettre la construction d’une voie ferrée.

À la condition toutefois que le terrain revienne au vendeur, si jamais on décidait d’éliminer la circulation des tramways, la bande de terre fut éventuellement cédée à la commission de transport de Montréal pour y établir une ligne d’autobus en 1958. Puis, en 1962, la ville en retira illégalement le contrôle à la commission des transports pour céder ce terrain à Québec.


Ce chemin devenu autoroute permet à des milliers de personnes d’y défiler tous les jours. La plupart de ceux-ci n’imaginent probablement pas que cet endroit a déjà été un endroit rural couvert de grandes terres fertiles qui ont été sacrifiées pour faire place à cette cicatrice urbaine, à cette horrible crevasse.

Au cours des années 1960, les projets de modernisation de la métropole ont créé de nombreuses traces dans le tissu urbain tant au niveau de l’aménagement du territoire qu’au niveau du cœur et de la mémoire des gens qui ont vécu de grands dérangements.


Vers 1960, avec la densification urbaine, un flot incessant d'automobiles doit être ajouté dans le système routier de la métropole. Les autorités en place s'entendent pour trouver un moyen de faciliter le passage nord-sud dans l’ouest de l'île de Montréal en évitant les feux de circulation et les basses limites de vitesse. En clair, une voie rapide devient une nécessité à Montréal. De plus, on observe des accidents fréquents à certaines intersections de Décarie comme par exemple, ici au coin de Jean-Talon où l’on enregistre plus d’un accident à toutes les 60 heures. C’est donc pour possiblement améliorer la fluidité de la circulation et améliorer la sécurité routière que le projet d’autoroute Décarie sera réalisé.


Ces travaux vont transformer radicalement certains secteurs le long de son tracé. Tout près de l'église Notre-Dame-de-Grâce, dans le noyau du village fondateur de ce vaste territoire de Notre-Dame-de-Grâce. Une tragédie va bientôt survenir comme dans plusieurs secteurs de Montréal. Au début des années 1960, avec la préparation de l’Exposition Universelle de 1967, le financement gouvernemental abonde pour réaliser rapidement de grands projets de transformation du paysage urbain. C’est avec cette soif de modernité et ce besoin réel de mobilité urbaine qu’on va prendre certaines décisions qui s’avéraient nécessaires et d’autres qu’il serait heureusement impossible de reproduire aujourd’hui.


Les ambitions du maire Drapeau


Pour la venue de l’Exposition Universelle de 1967, le maire Jean Drapeau veut amener Montréal au rang de capitale internationale moderne. Fièrement, il met des efforts monumentaux en œuvre pour faire disparaitre à tout prix l’aspect rural et villageois qui règne encore dans plusieurs secteurs de la métropole. Plusieurs territoires sont alors sacrifiés dont le célèbre le quadrilatère du faubourg a mélasse qui a permis l’érection de la tour de Radio-Canada.


Minto, le cœur du village séparé et des gens déracinés


Dans le secteur sud de la future autoroute Décarie, une véritable petite vie de quartier s’était développée autour des rue Minto, Prudhomme et Addington. Des logements y ont été construits pour la plupart vers le début des année 1900. Tout était en place pour permettre de créer une agréable vie de quartier avec un terrain de tennis sur plusieurs paliers, un club de boulingrin et de curling, le garage au coin de Minto et la ruelle à l’arrière.



La région la plus impactée sur le plan humain reste sans doute le quadrilatère formé par les rues Sherbrooke et Côte Saint-Antoine entre le chemin Décarie et la rue Addington. À cet endroit, les bâtiments ont été rasés. On a réaménagé le système dégoût ainsi que les installations électriques ce qui a fait que plusieurs familles ont dû quitter leur maison et leur village qui leur étaient si chers.

Et que dire de cette vie de quartier si précieuse qui ne s’achète pas?


Plusieurs expropriés y ont laissé une grande partie de leur vie et n’ont pu retrouver une qualité de vie équivalente. Tout ce qu’il leur reste encore aujourd’hui, ce sont des souvenirs et des mémoires. C’est précisément ce que nous aimerions faire revivre en retraçant vos histoires et vos photos. Nous n’avons pas encore réussi à retracer beaucoup d’information permettant de commémorer ce qui existait à cet endroit avant cette tragique coupure du quartier.

Les plans de densification urbaine ont eu d’importantes répercussions sur les familles établies depuis plusieurs générations. Il faut imaginer ce que peut représenter un tel événement pour ces personnes déracinés de leur lieu d'enfance rempli de précieux souvenirs. Privé à jamais du plaisir de revoir cet endroit tel qu’il était auparavant et tel qu’on l’aimait, les souvenirs nostalgiques d’enfance portent à rêver à un retour à l’arrière pour tenter de revivre les bons moments passés avec voisins et amis.


Avec le devoir de se souvenir vient aussi le devoir de ne pas reproduire les erreurs du passé. Heureusement, à moins d’une catastrophe naturelle, il n’est plus possible aujourd’hui de créer d’aussi terribles fractures au nom de la modernité car la vie humaine, l’environnement et le développement durable ont heureusement repris le dessus.


Texte et Recherche Jonathan Buisson Merci a Philippe Charuest pour certaines information et Photos





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